Les habitats
Des habitats différents pour des besoins différents
La survie de nombreuses espèces de limicoles migrateurs de la voie de migration Est- Atlantique dépend de la protection et la conservation d’un réseau de sites de zones humides qui sont d’importance critique en tant que zones de reproduction, mues, d’halte migratoire ou d’hivernage.
Dans de nombreuses régions, certains types d’écosystèmes des zones humides ont presque disparus en dehors des zones protégées. C’est particulièrement le cas avec les écosystèmes de prairies inondées naturelles dans certaines parties de l’Ouest de l’Europe. Il semble probable que dans les deux ou trois prochaines décennies, de nombreuses espèces de limicoles seront, à certains moments de l’année, confinées dans des Réserves Naturelles ou autres espaces protégés. Ces espaces constitueront les seuls endroits où ils pourront trouver leur alimentation et des sites de nidification et de repos en l’absence de toutes perturbations. C’est déjà le cas dans certains pays, comme par exemple pour la reproduction de la Barge à queue noire ou le Combattant varié au Royaume-Uni.
Différentes stratégies de migration peuvent être observées parmi les limicoles. Au cours de leurs longues migrations, les individus doivent interrompre leur voyage, souvent à plusieurs endroits, pour renouveler leurs réserves de graisse et de protéines. Trois principales stratégies de migrations ont été décrites : « hopping », « Skipping » et « jumping », où les oiseaux vont se déplacer par bonds plus ou moins longs. (Piersma, 1987). Ainsi la présence de zones de halte migratoire appropriées avec des ressources alimentaires abondantes apparait d’une importance cruciale. Certaines espèces n’utilisent qu’un très petit nombre de sites, probablement en raison de leur alimentation et de leurs habitats hautement spécialisés. Ces sites peuvent être extrêmement importants, car il semble que, dans de nombreux cas, aucune autre zone de rassemblement appropriée ne soit disponible. Ainsi, la perte ou la dégradation d’un de ces sites pourraient avoir de graves conséquences pour la population concernée. L’aire de rassemblement finale pendant la migration printanière peut être d’une importance également décisive, en particulier pour les espèces se reproduisant en Arctique. Lorsque ces oiseaux arrivent sur la toundra, les conditions d’alimentation peuvent être médiocres, ainsi les réserves d’énergie supplémentaires acquises au cours de la halte migratoire précédente s’avère comme déterminantes pour le succès de la reproduction.
Dans certains sites de halte migratoire, le taux de rotation des oiseaux peut être très élevé, et donc le nombre total d’oiseaux utilisant le site au cours d’une saison de migration peut être beaucoup plus important que le nombre présent à un instant t.
La période de mue, en particulier la mue d’aile, est un moment critique dans le cycle annuel des limicoles. Les besoins alimentaires sont élevés en raison de la demande accrue d’énergie pour la régulation thermique et la croissance des plumes. Il existe également un risque accru de prédation en raison de la manœuvrabilité réduite en vol. Il est donc probable que de nombreuses espèces auront un habitat répondant à ses exigences durant la période de mue.
Que les populations migratrices des limicoles puissent ou non se maintenir dépendra de l’efficacité du réseau d’aires protégées constituant une «route verte» à partir de lieux de reproduction jusqu’aux zones d’hivernage via une cascade de zones humides protégées qui peuvent servir de zones de mue et de constitution de réserves pour la migration.